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Contrastes

Interview d’Arthur Dreyfuss, Président FFTélécoms, sur Europe 1

Arthur Dreyfuss, Président de la Fédération Française des Télécoms, est intervenu sur Europe 1 le 16 juin 2019 face à Philippe Vandel au sujet des enjeux et perspectives sur la 5G, la sécurisation des réseaux et les investissements des opérateurs dans la couverture 4G avec le New Deal Mobile :

« La 5G permettra d’aller 10 fois plus vite, les entreprises seront les premières à en bénéficier et aussi les territoires. Le premier besoin pour les opérateurs télécoms c’est un besoin capacitaire, il faut pouvoir répondre aux besoins et aux attentes des consommateurs. Sur la 5G, nous travaillons sur plusieurs expérimentations, pour créer les business plans de demain. »

Replay de l’interview :

 


Transcription de l’interview :

Philippe Vandel, journaliste Europe 1 : Tout d’abord, qu’est-ce que la 5G et qu’est ce que cela va changer pour nous au quotidien ?

Arthur Dreyfuss : La 5G est une nouvelle technologie. L’arrivée de la 5G, ça va être des débits dix fois plus rapide que la 4G donc nous allons pouvoir télécharger dix fois plus vite alors qu’aujourd’hui on considère déjà que l’on télécharge très vite. Le réel besoin de la 5G sera un besoin pour les entreprises. Nous allons pouvoir développer un certain nombre de nouveaux usages, en terme de télémédecine, de voitures autonomes, dans l’agriculture connectée, dans la logistique… Pour les entreprises et les territoires, l’arrivée de la 5G va vraiment changer les usages et c’est une nouvelle génération qui arrive.

P.V : Je vais donner un exemple concret : avec la 4G, 100 000 équipements peuvent être reliés au km², avec la 5G, nous allons passer au million. C’est-à-dire que de nombreux objets seront eux-mêmes reliés, comme certaines voitures de luxe le sont déjà, votre vélo, le porte-clé et il sera également possible avec la 5G que les objets communiquent entre eux comme par exemple deux camions sur l’autoroute qui pourront se suivre de très près sans aucun danger ?

A.D : Absolument, la voiture autonome, c’est le fait de pouvoir gérer à distance du trafic sur les routes et autoroutes. L’agriculture connectée, ce sera de manœuvrer la gestion des champs à distance… Avant la voiture connectée, nous aurons très certainement le tracteur connecté.

P.V : Selon les experts, 20 milliards d’objets connectés pourraient l’être à terme, c’est donc trois fois plus que le nombre d’habitants sur Terre, ce sera dans un avenir à moyen ou long terme ?

A.D : Regardons chacun dans notre maison le nombre d’objets connectés. Il est déjà aujourd’hui bien plus important qu’il y a quelques années et vous avez plus d’objets connectés que de personnes dans la maison. Chaque année, ce nombre d’objets augmente et forcément, les besoins des utilisateurs augmentent également.

P.V : Quels sont les enjeux économiques, le budget mondial et le budget français ?

A.D : Le 1er besoin pour les opérateurs télécoms aujourd’hui avec la 5G, c’est d’abord un besoin capacitaire. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’aujourd’hui, le trafic sur les réseaux 4G devient de plus en plus encombré. En 2017, on a eu 150% de trafic en plus qu’en 2016, donc dans un premier temps, c’est pouvoir répondre aux besoins de tout un chacun qui téléchargent chaque jour plus que la veille. Le second point est de pouvoir appréhender les nouveaux usages pour les industries, les entreprises et de pouvoir répondre aux attentes qui sont de plus en plus fortes.

P.V : Est-ce un gros marché pour la France, est-ce comparable à la téléphonie d’aujourd’hui où tout va être décuplé et multiplié par deux ou trois ?

A.D : C’est un énorme marché qui demande des investissements extrêmement lourds. Il faut savoir que les opérateurs télécoms investissent d’ores et déjà 10 milliards d’euros par an dans les infrastructures, dans la fibre, dans la 4G sur des territoires qui ne possèdent pas encore cet outil. On parle beaucoup de 5G mais il faut savoir que l’on est déjà bien engagés pour apporter la 4G dans ce qu’on appelle les zones blanches, c’est-à-dire des zones où les français n’ont pas encore accès à la 4G.

P.V :  On a vu le problème que cela a fait puisque c’était une des revendications du mouvement des gilets jaunes avec ces déserts numériques. Quand est-ce que les enchères avec les appels d’offres vont-elles démarrer en France ?

A.D : Ce sera pour le deuxième semestre de 2019 et pour une attribution des fréquences tout début 2020.

P.V : On va retrouver les quatre mêmes opérateurs, Orange, SFR, Bouygues et Free où il y aura d’autres entrants ou peut-être des sorties puisque les investissements sont trop lourds ?

A.D : Gérer des fréquences que ce soit la 3G, la 4G, ou la 5G, c’est vraiment un métier des opérateurs et ensuite, nous travaillerons avec les industriels de l’automobile et de la logistique.

P.V : Vous n’avez pas répondu si les quatre que l’on a là seront les mêmes pour la 5G ?

A.D : On verra si les quatre candidateront à cet appel à candidature, on ne le sait pas encore.

P.V : Combien la 5G va coûter en plus pour nous les utilisateurs ?

A.D : Forcément, toute nouvelle technologie représente des investissements pour les opérateurs télécoms, des nouveaux usages, des nouveaux services, donc forcément cela aura un coût pour les consommateurs que ce soit le grand public ou les entreprises, les collectivités et les administrations. Nous travaillons à créer le business-model de demain. Aujourd’hui la 5G n’est pas encore présente en France mais les opérateurs ont utilisé cette dernière année à fare des expérimentations dans un certain nombre de villes françaises pour être définitivement prêts lorsque nous aurons ces fréquences 5G.

P.V : Et alors, quel a été le bilan de cette année d’expérimentation ?

A.D : On apprend avec les entreprises, le régulateur, le Gouvernement et on apprend aussi des modèles étrangers puisque dans certains pays, la 5G arrive d’ores et déjà.

P.V : Cette 5G provoque un vent de panique : les USA ont incuplé Huawei, le géant chinois, pour violation de l’embargo américain sur l’Iran et il leur reproche également d’avoir fait de l’espionnage industriel. En 2012, le congrès américain a qualifié Huawei de menace à la sécurité nationale et Donald Trump a demandé à ce que l’on se passe de ses services sur le territoire américain.

A-t’il de bonnes raisons d’avoir peur ou est-ce que c’est là l’expression d’une guerre commerciale ?

A.D : Il faut toujours être très précautionneux avec les enjeux de sécurité. Huawei est un équipementier présent en France et en Europe depuis plus de 10 ans. Les opérateurs travaillent d’ores et déjà avec eux.

P.V : Oui, cependant avec une nouvelle technologie qui va arriver, on pourrait mettre des sortes d’espions qui renverraient en Chine ce qu’ils ont entendu ici. Est-ce que vous pensez que cette menace est réelle ou ce sont seulement des élucubrations ?

A.D :  Quelles que soient les nouvelles technologies, nous devons être très prudents sur la sécurité des réseaux. On travaille quotidiennement, 15 000 ingénieurs travaillent chaque jour à la sécurité des réseaux, sur le contrôle des pouvoirs publics et du Gouvernement. L’objet de la sécurité des réseaux n’est pas nouveau. Il faut savoir que Huawei n’est pas présent dans les cœurs de réseaux en France et les opérateurs les utilisent pour la radio. Encore une fois, la sécurité des réseaux n’est pas un sujet pris à la légère et c’est le cas dans l’ensemble des pays européens. Nous participons donc et partageons pleinement la préoccupation du Gouvernement d’améliorer sans cesse la sécurité des réseaux et d’être très attentifs. Nous voulons que le débat autour de Huawei soit clair puisque que l’on fait des investissements lourds sur 5 ou 10 ans. Nous voulons des règles définies dès le départ qui ne changent pas en cours de route pour prévoir les investissements. Nous sommes engagés à déployer massivement nos réseaux sur le territoire national afin d’offrir à nos clients la meilleure qualité de service et les meilleures innovations.

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