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Arthur Dreyfuss, Président de la Fédération Française des Télécoms, est intervenu sur BFM Business le 15 juillet 2019 suite à la mise en consultation publique du projet de modalités des fréquences 5G par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) :

« C’est une bonne nouvelle que le processus d’attribution des fréquences 5G avance, les opérateurs multiplient les expérimentations en France depuis plusieurs mois pour être prêts. (…) On ne part pas d’une feuille blanche : 10 milliards d’euros investis par les opérateurs pour déployer la fibre dans le pays, nous sommes très mobilisés. Nous déployons pour qu’il n’y ait plus de zones blanches d’ici 2022. (…) Comme pour toute nouvelle technologie, la 5G va nécessiter des investissements lourds, le cahier des charges de l’Arcep est très ambitieux. (…) Les opérateurs déploient tous les jours dans les campagnes pour installer la fibre et la 4G, concentrons-nous d’abord sur nos objectifs actuels, c’est ce que nous faisons collectivement. (…) Aujourd’hui, on construit les business model de la 5G. Le premier besoin de la 5G sera de régler le problème capacitaire avec l’explosion des usages de nos clients et les nouveaux usages. (…) Les gagnants de la 5G seront les français, on a de la chance d’avoir des opérateurs qui investissent. C’est notre métier d’investir, de déployer, on le fait dans un environnement très concurrentiel ».

Vidéo | Replay de l’intervention d’Arthur DREYFUSS sur BFM Business (12min 12) :

Transcription :

[Générique de l’émission BFM Business « Inside : au coeur de l’éco »]

Thomas Sasportas (TS) : La 5G en France ça se précise : les opérateurs télécoms savent maintenant un petit peu plus à quoi s’en tenir. Arthur Dreyfuss, bonjour.

Arthur Dreyfuss (AD) : Bonjour.

TS : Vous êtes donc le Président de la Fédération Française des Télécoms. Pour être totalement transparents avec nos auditeurs et téléspectateurs, vous êtes aussi le Secrétaire général d’Altice en France. Altice bien sûr maison-mère d’SFR et des antennes de BFM TV et BFM Business. Mais si vous êtes là ce soir bien sûr c’est en tant que Président de la Fédération Française des Télécoms. C’est une présidence tournante : vous êtes arrivés il y a quelques mois. Avant vous, c’était Didier Casas de Bouygues Telecom, encore avant c’était Pierre Louette d’Orange. Et vous êtes donc là ce soir parce que vous êtes en première ligne pour cet appel d’offres de la décennie dans le secteur des télécoms. Appel d’offres pour les fréquences 5G. L’Arcep a présenté il y a une heure, à 17h45, les contours de cet appel d’offres. Et alors, visiblement, les pouvoirs publics ont changé de stratégie. Pour résumer, la 4G l’objectif c’est de faire monter les enchères le plus possible et après vous aviez une grande latitude pour déployer cette 4G vis-à-vis des territoires. Avec la 5G apparemment ça va être autre chose. On va être beaucoup moins ambitieux dans le prix de ces fréquences. En revanche, vous avez des contraintes assez fortes, assez précises, en terme de couverture du territoire.

AD : Déjà c’est une très bonne nouvelle que le processus d’attribution des fréquences 5G avance. Parce que nous, les opérateurs, nous y travaillons depuis de nombreux mois. On a multiplié les expérimentations à travers le pays. Des expérimentations dans différents secteurs industriels pour être prêt pour la 5G. Donc nous sommes aujourd’hui prêts à avancer.

TS : Les opérateurs sont prêts ?

AD : Ces derniers mois, nous avons multiplié les expérimentations [5G] dans les secteurs ferroviaires, dans les secteurs du transport notamment, de façon extrêmement utile et pragmatique, pour être prêts au moment où nous aurons les fréquences [5G] en 2020.

TS : D’accord alors on va rentrer dans le détail un petit peu des obligations parce qu’il y en a beaucoup. Je trouve que c’est le point le plus frappant : un pourcentage de territoire qui doit être couvert en 5G dans les zones blanches. C’est-à-dire dans les zones où il n’y a pas de réseau aujourd’hui, et évidemment, c’est le cœur du problème. Un quart des nouveaux sites, nous dit l’Arcep [Autorité de régulation des communications électroniques et des postes], entre 20 et 25%, doivent être couvert en 5G. Est-ce que ça, pour vous, c’est quand même un point compliqué ? Parce que, commercialement, ça n’est pas du tout une bonne nouvelle, ça n’est pas là où il y a les bassins d’emplois, ça n’est pas là où il y a les gens qui vivent où vous pouvez recruter beaucoup d’abonnés.

AD : Il faut bien avoir en tête une chose : c’est que l’on ne démarre pas d’une feuille blanche. Aujourd’hui, les opérateurs en 2018 ont investi près de 10 milliards d’euros dans les infrastructures. 10 milliards d’euros consacrés à la fibre optique, pour son déploiement aux quatre coins du pays et répondre à un objectif présidentiel d’avoir le pays fibré quasi intégralement d’ici fin 2022.

TS : On va y arriver ça d’ailleurs ? Fin 2022 c’est dans 3 ans.

AD : Nous étions encore il y a quelques jours dans le Sud de la France à Sisteron, près de Gap, pour déployer la fibre [optique] dans les zones rurales. Effectivement, nous sommes extrêmement mobilisés et investissons massivement pour déployer la fibre [optique] partout en France. Le deuxième enjeu, le deuxième niveau d’investissement que nous avons aujourd’hui, c’est, effectivement, régler enfin ce problème des zones blanches. Les quatre opérateurs se sont engagés, début 2018, à ce qu’il n’y ait plus la moindre zone blanche en France d’ici fin 2022. C’est la raison pour laquelle nous investissons 10 milliards d’euros par an. Donc pourquoi je dis que nous ne démarrons pas d’une feuille blanche ? Parce que, avec la 5G, une nouvelle technologie que nous attendons tous, nous rajoutons une strate d’investissements.

TS : On l’attend tous d’ailleurs cette technologie [5G], ça va vraiment être une révolution ? Ça va changer nos vies la 5G ?

AD : Chaque nouvelle technologie est plus performante que la précédente. La 4G était plus performante que la 3G. La 5G va permettre de nouveaux usages. Mais comme toute nouvelle technologie, elle va nécessiter des investissements, lourds et conséquents. Et le cahier des charges qu’est en train d’écrire l’Arcep est extrêmement ambitieux. Peut-être est-il trop ambitieux, notamment au regard des investissements extrêmement lourds que nous avons déjà à faire. Trop ambitieux pourquoi ? Parce que personne ne demande à ce qu’il y ait la 5G partout en France. Que dit l’appel à consultation publique de l’Arcep ? Il dit que chaque opérateur doit déployer 3 000 nouveaux sites d’ici fin 2022.

TS : Absolument.

AD : 8 000 nouveaux sites d’ici fin 2024. 12 000 nouveaux sites d’ici fin 2025.

TS : Mais la nouveauté c’est que, là-dedans, il y aura un quart, 20-25%, de tous ces milliers de sites qui doivent être en zone blanche. Alors que ça, jusqu’à présent, c’était pas formalisé. Est-ce que ça, vous vous dîtes : « C’est trop contraignant, c’est contraire à notre business model. » ?

AD : Nous passons chaque semaine beaucoup de temps dans ces territoires ruraux, parce que nous avons des équipes sur le terrain pour déployer la fibre [optique] notamment. Dans ces territoires ruraux, qu’est-ce qu’on nous réclame ? On nous réclame la 4G et la fibre, c’est ce qu’on nous répète tout le temps. Évidemment que la demande de 5G va augmenter mois après mois, année après année. Mais les investissements que l’on allons devoir faire doivent être progressifs. Pourquoi ? Parce que concentrons-nous d’abord sur les objectifs actuels que sont la fibre et la 4G. Et demain, effectivement nous aurons la 5G à déployer. Vous parliez de business model. Aujourd’hui, nous construisons et expérimentions ces business model. Ces industries, pour les particuliers. Et surtout, nous regardons ce qui se fait à l’étranger, dans d’autres pays où la 5G a déjà été lancée : les investissements se font progressivement. Je pense à la Grande-Bretagne, à la Corée du Sud, à la Suisse, aux États-Unis. Mais qu’est-ce qu’on voit également dans ces pays-là ? On voit les tarifs des abonnements téléphoniques.

TS : C’est 10 dollars de plus ? Ça augmente la facture de 10 dollars ?

AD : C’est au-delà de ça. En Suisse, un abonnement 4G, c’est 80 francs suisse, 70 euros.

TS : Oui mais le prix de départ est déjà plus élevé qu’en France.

AD : Oui, mais c’est important de l’avoir en tête. Parce qu’en France nous avons des prix bas depuis des années.

TS : Oui, mais ça ne changera pas avec la 5G, ça va augmenter mais c’est comme ça. Le marché est structuré autour de prix bas en France, on le sait, on a des prix parmi les plus bas en Europe.

AD : Oui mais est-ce que quand on voit tous les niveaux d’investissements que nous devons faire, est-ce nous devons nous en glorifier ? Je ne suis pas certains. Pourquoi, parce que dans les pays où les prix [des forfaits] sont peut être un peu plus élevé, correspondants à l’investissement massif, et bien ils ont déjà lancé la 5G. Les Etats-Unis, la Suisse, la Corée du Sud… on vient d’en parler. En Suisse, l’abonnement 4G est à 80 francs suisse ; entre 150 et 200 francs suisse pour l’abonnement 5G. En Grande-Bretagne, l’abonnement 4G est à 20 livres ; 30 livres pour l’abonnement 5G. Effectivement, chaque technologie nouvelle est un investissement important pour les opérateurs donc, à la fin, aura un coût plus important pour le consommateur, qu’il soit particulier ou entreprise.

TS : On a l’impression que cette 5G va être surtout décisive et tout changer pour les entreprises, pour l’industrie plutôt que pour les particulier. Au vue des applications, de ce que ça va permettre, c’est surtout un réseau qui va être utile pour le monde professionnel plus que pour nous finalement.

AD : Dès 2020, lorsque nous pourrons lancer la 5G en France, le premier besoin sera pour régler un problème capacitaire qu’ont les opérateurs aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que nos réseaux 4G sont confrontés à une explosion de la consommation de la data par nos clients. Donc nous avons besoin de ces fréquences [5G] pour répondre à ces enjeux capacitaires. Et ensuite, vous le dîtes très bien, les nouveaux usages que nous expérimentons aujourd’hui, dans la télémédecine, dans l’agriculture connectée, dans le transport autonome, dans le fret ferroviaire, dans la gestion portuaire ou aéroportuaire, nous travaillons à ces nouveaux usages, nous travaillons avec les industriels. Mais ces besoins-là ne vont pas arriver au 1er janvier 2020. Ils vont se construire dans les prochaines années. C’est pour cela qu’il y a une réalité économique qu’il faut mettre en face de ce calendrier très ambitieux qui nous est aujourd’hui proposé par l’Arcep.

TS : Très ambitieux, pour résumer justement, une réponse claire : est-ce que pour vous, cet appel d’offres est trop contraignant, est-ce qu’il y a trop de contraintes sur les zones blanches. Je lisais aussi : « 2 grandes villes doivent être couvertes [en 5G] dès 2020 », donc dès l’année prochaine, l’année du lancement. Les principaux axes routiers couverts d’ici 2022-2025. Est-ce que vous dîtes : « Là, l’Arcep, vous êtes trop gourmands, on ne va pas y arriver ».

AD : Ce qui est certains, c’est que l’on a aussi une inconnue dans cet appel à candidatures. C’est le niveau des enchères. Parce qu’il y a nécessairement à regarder l’ensemble des dépenses. Il y a, d’un côté, le niveau des enchères…

TS : Ah ça normalement le gouvernement s’est engagé à ce que ça coûte, entre guillemets, « pas très cher ». Sébastien Soriano, qui était à votre place il y a quelques semaines, disait au micro d’Hedwige Chevrillon : « On n’ira pas au dessus de 2 milliards [d’euros]. 2 milliards, c’est déjà un maximum. » Donc on est bien en dessous des 6 milliards, par exemple, dont vous parliez en Allemagne ou en Italie. Donc, justement, on a une facture qui va être basse pour les fréquences pour vous permettre d’investir.

AD : Mais vous devez regarder l’ensemble de l’équation. Les enchères, le niveau des enchères, les investissements à réaliser, dans quel calendrier, quel volume, les investissements en cours, la 4G dans les zones blanches, la fibre [optique] et la réalité du marché et notamment dont nous parlions tout à l’heure.

TS : Très bien. Alors un autre gros changement aussi qui est mis en avant dans cet appel d’offre, c’est que vous allez moins vous battre pour les fréquences, je m’explique : l’Arcep fixe pour chaque opérateur un plafond et un plancher de quantité de fréquences qui vont pouvoir être achetés par les opérateurs. Autrement dit, tout le monde va pouvoir avoir de la 5G. Vous allez peut être moins vous battre pour les fréquences qu’auparavant. Tout le monde va avoir un minimum et un maximum. Donc, au final, elle va être partagée entre tous. Est-ce qu’au final, ça va être plus compliqué pour les opérateurs de se différencier sur la 5G si tout le monde va pouvoir en proposer ?

AD : Chaque opérateur, dans le cadre de ce processus d’enchères, aura sa stratégie propre. Et c’est évidemment pas en tant que représentant de la Fédération Française des Télécoms que je peux commenter sur quelle sera la stratégie de l’un ou de l’autre. Et je suis convaincu, à l’heue à laquelle je vous parle, chaque opérateur travaille à la meilleure de ces stratégies.

TS : Non mais à la lecture de cet appel d’offres, on a l’impression qu’au final, tout le monde va avoir à peu près, je dis bien « à peu près », la même 5G à offrir à ses clients, avec ce système de plafond et de plancher.

AD : Oui vous savez, il y a énormément d’éléments discriminants selon les opérateurs. Dans la qualité de service, dans la qualité du réseau, dans la présence territoriale… et il ne m’appartient pas aujourd’hui de vous dire lequel serait le plus performant ou le moins performant. Avec une autre casquette, bien volontiers.

TS : Ça n’était pas le sens de ma question, on a l’impression que, finalement, tout le monde va pouvoir offrir à peu près la même 5G. Disons que ça va être plus compliqué pour vous de monétiser ça et de justifier des hausses de prix.

AD : Et pourtant c’est en enjeu majeur, l’idée n’est pas de justifier des hausses de prix.

TS : On a l’impression qu’il n’y a aucun opérateur qui va être le grand gagnant de cet appel d’offres, c’est ça que je veux dire, c’est que tout le monde finalement va être un peu gagnants, il n’y aura pas de perdants.

AD : Je pense que nous devons penser à qui doivent être les grands gagnants des investissements des opérateurs télécoms, ce sont les Français. Et on a de la change en France d’avoir des opérateurs qui investissement autant, qui s’engagent tellement dans la fibre optique, qui s’engage dans ce programme pour régler le problème des zones blanches et qui, demain, s’engageront dans la 5G. Mais, à une autre époque, les politiques disaient : « C’est pas grave, c’est l’État qui paye. » Or là, ce sont les opérateurs qui paient, ce sont les opérateurs qui créent de l’emploi, ce sont les opérateurs qui, chaque jour, ont des techniciens sur le terrain. Donc il y a une réalité économique des opérateurs télécoms. C’est notre métier d’investir. C’est notre métier de déployer des réseaux. C’est notre métier d’aller dans les 4 coins du territoire pour donner la meilleure qualité de service à nos clients. Mais, notre métier, on le fait avec de l’argent que l’on n’invente pas, dans un secteur très concurrentiel, et pour lequel on est pleinement engagé parce que l’on est passionnés. Et on est passionnés à chaque arrivée de nouvelle technologie et c’est la raison pour laquelle on est très satisfait de voir que la 5G avance et arrive enfin en France.

TS : Ça se rapproche… Bon en tout cas l’appel d’offres, effectivement, ça sera à l’automne et puis le lancement de la 5G l’année prochaine, en 2020. Merci beaucoup Arthur Dreyfuss.

Arthur Dreyfuss, Président de la Fédération Française des Télécoms, est intervenu sur Europe 1 le 16 juin 2019 face à Philippe Vandel au sujet des enjeux et perspectives sur la 5G, la sécurisation des réseaux et les investissements des opérateurs dans la couverture 4G avec le New Deal Mobile :

« La 5G permettra d’aller 10 fois plus vite, les entreprises seront les premières à en bénéficier et aussi les territoires. Le premier besoin pour les opérateurs télécoms c’est un besoin capacitaire, il faut pouvoir répondre aux besoins et aux attentes des consommateurs. Sur la 5G, nous travaillons sur plusieurs expérimentations, pour créer les business plans de demain. »

Replay de l’interview :

 


Transcription de l’interview :

Philippe Vandel, journaliste Europe 1 : Tout d’abord, qu’est-ce que la 5G et qu’est ce que cela va changer pour nous au quotidien ?

Arthur Dreyfuss : La 5G est une nouvelle technologie. L’arrivée de la 5G, ça va être des débits dix fois plus rapide que la 4G donc nous allons pouvoir télécharger dix fois plus vite alors qu’aujourd’hui on considère déjà que l’on télécharge très vite. Le réel besoin de la 5G sera un besoin pour les entreprises. Nous allons pouvoir développer un certain nombre de nouveaux usages, en terme de télémédecine, de voitures autonomes, dans l’agriculture connectée, dans la logistique… Pour les entreprises et les territoires, l’arrivée de la 5G va vraiment changer les usages et c’est une nouvelle génération qui arrive.

P.V : Je vais donner un exemple concret : avec la 4G, 100 000 équipements peuvent être reliés au km², avec la 5G, nous allons passer au million. C’est-à-dire que de nombreux objets seront eux-mêmes reliés, comme certaines voitures de luxe le sont déjà, votre vélo, le porte-clé et il sera également possible avec la 5G que les objets communiquent entre eux comme par exemple deux camions sur l’autoroute qui pourront se suivre de très près sans aucun danger ?

A.D : Absolument, la voiture autonome, c’est le fait de pouvoir gérer à distance du trafic sur les routes et autoroutes. L’agriculture connectée, ce sera de manœuvrer la gestion des champs à distance… Avant la voiture connectée, nous aurons très certainement le tracteur connecté.

P.V : Selon les experts, 20 milliards d’objets connectés pourraient l’être à terme, c’est donc trois fois plus que le nombre d’habitants sur Terre, ce sera dans un avenir à moyen ou long terme ?

A.D : Regardons chacun dans notre maison le nombre d’objets connectés. Il est déjà aujourd’hui bien plus important qu’il y a quelques années et vous avez plus d’objets connectés que de personnes dans la maison. Chaque année, ce nombre d’objets augmente et forcément, les besoins des utilisateurs augmentent également.

P.V : Quels sont les enjeux économiques, le budget mondial et le budget français ?

A.D : Le 1er besoin pour les opérateurs télécoms aujourd’hui avec la 5G, c’est d’abord un besoin capacitaire. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’aujourd’hui, le trafic sur les réseaux 4G devient de plus en plus encombré. En 2017, on a eu 150% de trafic en plus qu’en 2016, donc dans un premier temps, c’est pouvoir répondre aux besoins de tout un chacun qui téléchargent chaque jour plus que la veille. Le second point est de pouvoir appréhender les nouveaux usages pour les industries, les entreprises et de pouvoir répondre aux attentes qui sont de plus en plus fortes.

P.V : Est-ce un gros marché pour la France, est-ce comparable à la téléphonie d’aujourd’hui où tout va être décuplé et multiplié par deux ou trois ?

A.D : C’est un énorme marché qui demande des investissements extrêmement lourds. Il faut savoir que les opérateurs télécoms investissent d’ores et déjà 10 milliards d’euros par an dans les infrastructures, dans la fibre, dans la 4G sur des territoires qui ne possèdent pas encore cet outil. On parle beaucoup de 5G mais il faut savoir que l’on est déjà bien engagés pour apporter la 4G dans ce qu’on appelle les zones blanches, c’est-à-dire des zones où les français n’ont pas encore accès à la 4G.

P.V :  On a vu le problème que cela a fait puisque c’était une des revendications du mouvement des gilets jaunes avec ces déserts numériques. Quand est-ce que les enchères avec les appels d’offres vont-elles démarrer en France ?

A.D : Ce sera pour le deuxième semestre de 2019 et pour une attribution des fréquences tout début 2020.

P.V : On va retrouver les quatre mêmes opérateurs, Orange, SFR, Bouygues et Free où il y aura d’autres entrants ou peut-être des sorties puisque les investissements sont trop lourds ?

A.D : Gérer des fréquences que ce soit la 3G, la 4G, ou la 5G, c’est vraiment un métier des opérateurs et ensuite, nous travaillerons avec les industriels de l’automobile et de la logistique.

P.V : Vous n’avez pas répondu si les quatre que l’on a là seront les mêmes pour la 5G ?

A.D : On verra si les quatre candidateront à cet appel à candidature, on ne le sait pas encore.

P.V : Combien la 5G va coûter en plus pour nous les utilisateurs ?

A.D : Forcément, toute nouvelle technologie représente des investissements pour les opérateurs télécoms, des nouveaux usages, des nouveaux services, donc forcément cela aura un coût pour les consommateurs que ce soit le grand public ou les entreprises, les collectivités et les administrations. Nous travaillons à créer le business-model de demain. Aujourd’hui la 5G n’est pas encore présente en France mais les opérateurs ont utilisé cette dernière année à fare des expérimentations dans un certain nombre de villes françaises pour être définitivement prêts lorsque nous aurons ces fréquences 5G.

P.V : Et alors, quel a été le bilan de cette année d’expérimentation ?

A.D : On apprend avec les entreprises, le régulateur, le Gouvernement et on apprend aussi des modèles étrangers puisque dans certains pays, la 5G arrive d’ores et déjà.

P.V : Cette 5G provoque un vent de panique : les USA ont incuplé Huawei, le géant chinois, pour violation de l’embargo américain sur l’Iran et il leur reproche également d’avoir fait de l’espionnage industriel. En 2012, le congrès américain a qualifié Huawei de menace à la sécurité nationale et Donald Trump a demandé à ce que l’on se passe de ses services sur le territoire américain.

A-t’il de bonnes raisons d’avoir peur ou est-ce que c’est là l’expression d’une guerre commerciale ?

A.D : Il faut toujours être très précautionneux avec les enjeux de sécurité. Huawei est un équipementier présent en France et en Europe depuis plus de 10 ans. Les opérateurs travaillent d’ores et déjà avec eux.

P.V : Oui, cependant avec une nouvelle technologie qui va arriver, on pourrait mettre des sortes d’espions qui renverraient en Chine ce qu’ils ont entendu ici. Est-ce que vous pensez que cette menace est réelle ou ce sont seulement des élucubrations ?

A.D :  Quelles que soient les nouvelles technologies, nous devons être très prudents sur la sécurité des réseaux. On travaille quotidiennement, 15 000 ingénieurs travaillent chaque jour à la sécurité des réseaux, sur le contrôle des pouvoirs publics et du Gouvernement. L’objet de la sécurité des réseaux n’est pas nouveau. Il faut savoir que Huawei n’est pas présent dans les cœurs de réseaux en France et les opérateurs les utilisent pour la radio. Encore une fois, la sécurité des réseaux n’est pas un sujet pris à la légère et c’est le cas dans l’ensemble des pays européens. Nous participons donc et partageons pleinement la préoccupation du Gouvernement d’améliorer sans cesse la sécurité des réseaux et d’être très attentifs. Nous voulons que le débat autour de Huawei soit clair puisque que l’on fait des investissements lourds sur 5 ou 10 ans. Nous voulons des règles définies dès le départ qui ne changent pas en cours de route pour prévoir les investissements. Nous sommes engagés à déployer massivement nos réseaux sur le territoire national afin d’offrir à nos clients la meilleure qualité de service et les meilleures innovations.

Arthur Dreyfuss, Président de la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms), est intervenu dans la matinale de Radio Classique le 11 juin 2019 face à Dimitri Pavlenko au sujet des enjeux et perspectives sur la 5G, la sécurisation des réseaux et les investissements des opérateurs dans la couverture 4G avec le New Deal Mobile :

Replay de l’interview :


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Transcription de l’interview :

Dimitri Pavlenko, journaliste : Vous avez une échéance importante au Sénat avec la proposition de loi sur la sécurisation des réseaux. Cette proposition, qu’est ce que vous en savez, qu’y-a t’il dedans et est-ce qu’elle vous inquiète ?

Arthur Dreyfuss, Président FFTélécoms : Nous ne sommes pas d’un naturel inquiet, nous sommes des gens extrêmement responsables et prudents. La sécurité des réseaux est le cœur de notre métier. On a chaque jour 15 000 ingénieurs dont le quotidien est de s’assurer que nos réseaux soient les plus fiables, les plus résilients et permettent la sécurité de nos réseaux fixes et mobiles.

D.P : Faut-il bannir Huawei, qu’attendez-vous de la France sur ce dossier-là ?

A.D : Huawei est présent depuis plus de 10 ans sur les antennes radio comme le sont d’autres équipementiers comme Nokia et Ericsson. Nous partageons le soucis de l’État qui est d’avoir des réseaux dont la sécurité n’est pas contestable. On passe notre quotidien à gérer la sécurité de nos réseaux.

Maintenant, on dit la chose suivante : ne créons pas un remède qui soit pire que le mal envisagé. L’enjeu de la sécurité nationale est également notre enjeu. Ce que nous voulons dire aujourd’hui, c’est posons-nous les bonnes questions, ayons une approche concrète et pragmatique.

Je ne pense pas que nos partenaires britanniques et allemands traitent le sujet de la sécurité avec légèreté, ils ont le même soucis que nous en terme de sécurité des réseaux.

D.P : Il y a un gros enjeu financier aussi puisque  le GSMA, l’association mondiale des opérateurs, évalue à 55 milliards d’euros le surcoût et à 18 mois de retard une éventuelle interdiction des chinois Huawei et ZTE, ce qui représente un scénario d’interdiction mondial. Les concurrents de Huawei sont aussi beaucoup plus chers…

A.D : Que permet la concurrence entre équipementiers ? Cela permet d’avoir toujours une meilleure qualité de service, de favoriser l’innovation, de ne pas avoir des prix excessifs et notre soucis est de trouver le bon équilibre entre la sécurité nationale, respecter nos engagements et nos déploiements mobiles puisque nous sommes engagés pour résoudre le problème des zones blanches avec le New Deal et nous avons demain les enjeux majeurs de la 5G. Notre troisième préoccupation est d’assurer pour les français qui sont nos clients une meilleure qualité de service.

D.P : À combien les opérateurs chiffrent-ils le surcoût s’ils devaient se passer de Huawei ?

A.D : Le GSMA le chiffre à plus de 50 milliards mais nous, nous ne disons pas qu’il faut passer par tel équipementier ou tel autre. Ce dont on a besoin, ce sont des règles extrêmement claires. Quand les opérateurs télécoms investissent, et c’est notre métier d’investir, puisqu’en 2018 les opérateurs ont investi plus de 10 milliards d’euros, c’est sur le moyen ou long terme. On a besoin de règles claires qui nous permettent de prévoir ces investissements.

D.P : Vous êtes donc en train de dire que vous souhaitez que le Sénat se prononce au plus vite. Vous attendez du législateur que des règles clairement définies le soient d’ici la fin de l’année ?

A.D : Des règles clairement définies qui nous permettent de prévoir nos investissements et qu’on ne crée pas une machine administrative qui empêcherait de respecter nos engagements en matière de déploiement, qui nuirait à la qualité de service, à l’innovation et qui permette de poursuivre cette concurrence entre équipementiers qui est indispensable pour nos clients.

D.P : Sur la 5G, le Gouvernement a transmis le mois dernier sa lettre de cadrage à l’ARCEP. Il y aura à l’automne l’appel à candidatures pour les fréquences 5G…

A.D : Nous, ce que l’on veut, c’est un prix qui n’empêche pas d’investir demain. Le plus important est la capacité pour les opérateurs d’investir pour que les français aient accès à la 5G. La 5G est une nouvelle technologie et on va apprendre collectivement à la connaître. Nous-mêmes les opérateurs télécoms avons déjà commencé, c’est la raison pour laquelle nous sommes prêts. Depuis plus d’un an maintenant, nous lançons partout en France un certain nombre d’expérimentations et nous apprenons à construire des nouveaux business model pour les entreprises et les particuliers. Comme toute nouvelle technologie, la 5G aura un coût.

Aujourd’hui nous sommes à la veille du lancement officiel de la 5G. Nous sommes prêts et nous voulons pouvoir avoir des capacités d’investissements pour offrir cette 5G aux entreprises françaises, au territoire et aux français.

Didier Casas, Président de la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms), était invité le 1er février 2019 à participer à l’émission « Entendez-vous l’éco » sur France Culture pour expliquer concrètement comment se font les déploiements des réseaux mobiles en France, la question de la sécurisation des réseaux et la position des opérateurs français face à l’amendement de la loi Pacte déposé au Sénat sur la sécurisation des réseaux.

Deux autres experts étaient également sur le plateau :

  • Sébastien Jean, Directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) ;
  • Claude Meyer, Conseiller au Centre Asie de l’Institut français des relations internationales (IFRI), Professeur à Sciences Po.

(Ré)écouter le replay de l’émission :

Retrouvez ci-dessous les interventions TV et radio de Didier Casas, Président de la Fédération Française des Télécoms, en décembre 2018 pour présenter les chiffres-clés 2018 et indicateurs sur le secteur des télécoms français :


BFM Business

Vidéo | Émission « L’heure H » avec Hedwige Chevrillon le 17 décembre 2018 :


France Info

Vidéo | Émission « L’invité éco » avec Olivier de Lagarde le 17 décembre 2018 :


Radio Classique

Vidéo | Émission « La Question Éco » avec Dimitri Pavlenko le 17 décembre 2018 :


Média+

Interview de Didier Casas : « Les opérateurs télécoms subissent la pression concurrentielle des géants du net ».

lire l’interview

Didier Casas, Président de la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms), est intervenu le 27 septembre 2018 au Forum « Telco & Digital » du Groupe Les Echos – Le Parisien, aux tables rondes suivantes :

Table ronde #1 : « Déploiement du Très Haut Débit fixe & mobile : un chantier à haut risque ? » avec :

  • Antoine Darodes, Directeur de l’Agence du Numérique ;
  • Étienne Dugas, Président d’Infranum ;
  • Olivier Huart, Président-directeur général de TDF ;
  • Frédéric Jover, Associé chez PMP Conseil.

Table ronde #2 : « 5G : à quand le décollage ? » avec :

  • Thierry Boisnon, Président de Nokia France ;
  • Cécile Dubarry, Directrice générale de l’ARCEP ;
  • Gilles Vaqué, Président de PMP Conseil.

Retrouvez ci-dessous les principaux temps forts de ses interventions :

Le 31 juillet 2018, Michel Combot, Directeur général de la Fédération Française des Télécoms, est intervenu dans l’émission « Le Téléphone Sonne » sur France Inter consacrée à internet, la téléphonie mobile et les zones blanches.

Les autres invités de l’émission :

 

Replay de l’émission :


Plus d’informations : www.franceinter.fr/emissions/le-telephone-sonne/le-telephone-sonne-31-juillet-2018

 

Michel Combot est également intervenu le 15 août 2018 dans l’émission « Le débat de midi » sur le thème « Les déserts numériques sont-ils inévitables ? », à réécouter ci-dessous :

Didier Casas, Président de la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms), est intervenu sur le plateau de BFM Business le 18 juillet 2018 face à Stéphane Soumier au sujet des enjeux de la 5G et de la position des opérateurs télécoms :

Vidéo | Interview de Didier Casas sur BFM Business (18/07/2018) :

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Didier Casas, Président de la Fédération Française des Télécoms, était le 8 juin 2018 l’invité des Échos par Fabienne Schmitt.

Point sur le New Deal Mobile entre le Gouvernement et les opérateurs de téléphonie mobile, annonce des premières inaugurations des sites multi-opérateurs 4G dans les Deux-Sèvres, simplifications des démarches administratives… retrouvez ci-dessous en vidéo l’intégralité de son intervention :

Vidéo | Interview de Didier Casas dans Les Echos (08/06/2018) :