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Contrastes

Aphasie et téléphone : création du premier diplôme universitaire pour accompagnants

La Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms) s’engage auprès de la Fédération Nationale des Aphasiques de France (FNAF) pour créer à la rentrée 2019, le premier diplôme universitaire de formation des accompagnants chargés d’assister les personnes aphasiques lors de leurs conversations téléphoniques.

Vidéo | Aphasie et téléphone : création du premier diplôme universitaire pour accompagnants :

L’aphasie est la perte totale ou partielle du langage. En France, on estime qu’elle touche plus de 300 000 personnes et 30 000 nouveaux cas sont recensés chaque année.

Ces personnes seront ensuite intégrées au centre relais téléphonique déjà ouvert pour les personnes sourdes et malentendantes, qui a été mis en place et qui est piloté par les opérateurs de la FFTélécoms : Bouygues Telecom, Euro-Information Telecom, La Poste Mobile, Orange et SFR.

Ce nouveau cursus a pour objectif de permettre aux personnes aphasiques de pouvoir communiquer au téléphone, ce qui leur était impossible auparavant. Par l’intermédiaire de cet opérateur ainsi formé, la personne aphasique peut communiquer avec son correspondant au téléphone et gagne ainsi en autonomie.

Le diplôme universitaire est ouvert aux étudiants en médecine et en sciences humaines et sociales, mais également aux professionnels travaillant déjà dans un centre relais téléphonique, comme par exemple les codeurs en langage parlé-complété.

Il est déjà possible de s’inscrire à ce diplôme universitaire pour la rentrée de septembre 2019. La FFTélécoms, qui soutient la FNAF dans son engagement auprès de ce diplôme universitaire du CHU du Toulouse, est déterminée à ouvrir un service dédié aux personnes aphasiques, dans le cadre du Centre relais de communications interpersonnelles en juin 2020, ce qui constituera une première mondiale !

Pour rappel, depuis le 8 octobre 2018, les opérateurs de la FFTélécoms proposent à leurs clients une heure gratuite par mois de communication accessible, à savoir en langue des signes française, en langage parlé-complété ou en sous-titrage des conversations.

Avec la volonté d’inclure toujours le plus grand nombre de personnes dans l’accès au numérique, les représentants des opérateurs se sont mobilisés, pendant plusieurs mois, pour que ce nouveau cursus soit mis en place au plus vite.

Pour plus d’informations :


Interview du Président de la Fédération Nationale des Aphasiques de France (FNAF)

Rencontre avec Jean-Dominique Journet, Président de la FNAF à l’occasion d’un nouveau Diplôme Universitaire qui ouvrira à la rentrée prochaine.

La FFTélécoms : pouvez-vous nous expliquer ce qu’est l’aphasie ?

Jean Dominique Journet : l’aphasie est la perte totale ou partielle du langage, consécutive à une lésion du cerveau : Accident Vasculaire Cérébral ou A.V.C (75% des cas, soit par hémorragie ou ischémie), traumatismes crâniens, tumeurs cérébrales, causes dégénératives comme la Maladie d’Alzheimer, plus rarement causes infectieuses ou inflammatoires. Le niveau de gravité peut varier, allant d’un léger trouble à une absence totale de communication. Le déficit peut toucher isolément ou conjointement les différentes composantes du langage :  parole / langage, compréhension/expression, oral/écrit, lettres/calcul… Le langage est commandé par le cerveau et il est généralement localisé dans l’hémisphère gauche. La perturbation des différentes activités du langage (parler, comprendre, lire ou écrire) dépend de la localisation et de l’ampleur de la lésion.

La FFTélécoms : combien de personnes sont concernées en France ?

Jean Dominique Journet : en France, on estime que l’aphasie touche plus de 300 000 personnes et 30 000 nouveaux cas sont recensés chaque année. L’aphasie peut toucher tout le monde. Elle se rencontre à tous les âges de la vie, chez les hommes comme les femmes, et dans toutes les catégories sociales. L’âge moyen de survenue d’un A.V.C est de 73 ans (70 ans pour les hommes et 76 ans pour les femmes). Le quart des A.V.C concernent des personnes de moins de 65 ans, la moitié des personnes de 65 à 84 ans et un autre quart, des personnes d’au moins 85 ans.

La FFTélécoms : quelles sont les difficultés que rencontrent ces personnes dans la vie de tous les jours ?

Jean-Dominique Journet : la personne aphasique peut avoir des difficultés variables pour parler, comprendre, lire ou écrire. L’aphasie va donc avoir des répercussions sur la vie quotidienne de la personne aphasique et de sa famille. C’est un bouleversement, une nouvelle vie pour eux :  comment converser, téléphoner, regarder la télévision, écouter la radio, lire le journal, écrire une liste de courses, des lettres, remplir des formulaires, faire des calculs, se « débrouiller » dans un lieu inconnu.…

Mais je veux expliquer que malgré ces difficultés rencontrées dans le quotidien, l’aphasie n’est pas un trouble psychique ou un handicap mental. Les capacités intellectuelles de la personne aphasique sont préservées. La personne aphasique n’est pas malentendante, n’a pas de problème de voix. Nous sommes donc capables de réfléchir et de communiquer si on nous aide à nous exprimer !

La FFTélécoms : comment analysez-vous la mobilisation des membres de la FFTelecoms pour l’accessibilité ?

Jean-Dominique Journet : la FNAF a participé à une expérimentation de l’accessibilité du relais téléphonique pour les aphasiques (ORIGO) qui a montré que c’était possible et utile pour les aphasiques. Nous sommes ravis de voir que la Fédération Française des Télécoms se mobilise pour la mise en place concrète de ce service qui est une première mondiale pour les aphasiques.

La FFTélécoms : le premier Diplôme Universitaire sur l’aphasie qui permettra de recruter des personnes pouvant justement répondre au Centre de Relais Téléphonique (CRT) va être lancé en septembre prochain. Qu’en attendez-vous ?

Jean-Dominique Journet : l’opérateur-relais permet précisément de poser un cadre de communication adapté entre l’aphasique et son interlocuteur. Il pourra reformuler si l’aphasique n’a pas compris. Il pourra noter par écrit les informations compliquées comme les dates et les heures, ou montrer ses informations à l’écran sur un calendrier ou une horloge. L’opérateur-relais pourra aussi faire patienter l’interlocuteur si l’aphasique ne trouve pas ses mots. Pour les personnes aphasiques les plus en difficulté, l’opérateur-relais pourra utiliser des images et des pictos en plus de la parole, de l’écrit et des gestes, pour comprendre ce qu’il veut dire, et faire comprendre ce que lui répond l’interlocuteur.

Nous attendons donc de ce DU des opérateurs-relais qui maîtrisent la communication avec des aphasiques, qui s’adaptent aux pratiques de communication et aux besoins de chaque aphasique qui appelle, et qui gardent aussi la bonne place pour rester au service des deux interlocuteurs.

Pour en savoir plus sur le DU :

La FFTélécoms : notre fédération agit pour rendre accessible au plus grand nombre ses informations. Nous avons produit notre bilan de la charte accessibilité en version Facile À Lire et à Comprendre (FALC) et nous prévoyons de développer ces version FALC sur d’autres thématiques liées aux télécoms, qu’en pensez-vous ?

Jean-Dominique Journet : le français Facile À Lire et à Comprendre, c’est une bonne idée. C’est un premier pas que nous devons saluer. Il faudrait maintenant aussi ajouter des images, comme fait Santé-BD.


Le +

Les conseils de Jean-Dominique Journet pour faciliter la communication avec une personne aphasique :

  • Aménagez un environnement calme autour de l’aphasique (évitez la télévision, la radio, plusieurs personnes qui parlent en même temps). Communiquer demande beaucoup de concentration à la personne aphasique.
  • Attention, l’aphasique se fatigue vite. Parler est un effort permanent même quand les progrès sont encourageants.  La personne a besoin de moments de récupération.
  • Soyez réceptif à tous les modes de communication (gestes, mimiques, sourires…), et Encouragez-les.
  • Ne parlez pas de la personne aphasique en sa présence comme si elle n’était pas là.  La personne aphasique peut comprendre mais pas forcément tout.
  • Pensez que la personne aphasique sait ce qu’elle veut dire mais qu’elle ne peut pas l’exprimer en paroles ou qu’elle bute sur les mots.
  • N’infantilisez pas la personne, adressez-vous à elle comme à une personne adulte et intelligente.
  • Soyez disponible et donner lui du temps pour s’exprimer et vous comprendre, même si cela provoque des « blancs » dans l’échange.
  • Ne parlez pas à sa place.
  • Ne faites pas semblant d’avoir compris, elle s’en rendra compte mais cherchez à comprendre ce qu’elle veut vous dire.
  • Les injures ou le tutoiement sont souvent involontaires chez l’aphasique, tolérez le manque de contrôle verbal.
  • Attention, la personne peut confondre le oui/non, il est parfois utile de vérifier si vous vous êtes bien compris.

Pour l’aider à vous comprendre :

Les troubles de la compréhension sont fréquents mais passent souvent inaperçus.

  • Parlez lentement face à la personne, mais restez naturel, gardez les intonations.
  • Utilisez les gestes (montrer, mimer).
  • Faites des phrases simples et courtes.
  • Préférez des mots concrets dans un premier temps.
  • Donnez une idée à la fois. Posez des questions simples.
  • Marquez des pauses entre les phrases.
  • Reformulez si nécessaire.
  • Ne sautez pas du coq à l’âne. Prévenez la personne si vous changez de sujet.
  • Tentez l’écrit : écrivez l’idée principale en un mot seulement ou avec un dessin.

La compréhension est facilitée lorsqu’on s’appuie sur la situation en cours ou à défaut, des éléments qui illustrent la conversation (par exemple, des photos des personnes dont on veut lui parler ou celle d’un lieu).

Pour l’aider à s’exprimer :

Le but premier n’est pas d’exercer le langage mais de préserver la communication et l’échange quel qu’il soit avec votre proche.

  • Ne confondez pas communication et rééducation, la priorité reste toujours la communication (verbale ou non).
  • Sollicitez-la, encouragez-la à parler.
  • Laissez-lui le temps de s’exprimer, la recherche d’un mot ou d’une phrase peut être longue.
  • Ne finissez pas ses phrases à sa place pour gagner du temps, vous risquez de vous tromper et de compliquer l’échange.
  • Concentrez-vous plus sur le sens, le contenu que sur la forme, l’essentiel est qu’elle se fasse comprendre.
  • Encouragez la personne à s’exprimer par tous les moyens possibles (gestes, dessin, mimiques, désigner les objets, l’écrit si elle le peut…).
  • N’interrompez pas l’aphasique dès qu’il se trompe. Ne le corrigez pas sans arrêt
  • Ne le faites pas répéter si vous avez compris car cela peut le décourager.
  • Posez des questions auxquelles la personne peut répondre par oui/non. Mais faites attention à la fiabilité de la réponse.
  • Ne posez qu’une question à la fois et attendez sa réponse.
  • Pour l’aider à trouver le mot qu’elle cherche quand vous le connaissez : vous pouvez lui donner la première lettre ou la première syllabe du mot. Par exemple si le mot est « chapeau » soit en donnant « ch… », soit « cha… » et vous pouvez mettre le mot dans son contexte et lui laisser finir la phrase : « Je vais chez le dentiste quand j’ai mal aux ______. »

Si la personne parle beaucoup mais de façon incompréhensible (jargon) :

  • Ne lui cachez pas que vous ne la comprenez pas.
  • Canalisez-la autant que vous pouvez (consignes et questions simples).
  • Stoppez-la dans son discours si nécessaire tout en canalisant son regard.
  • Rassurez-la si son comportement est agressif, si elle est irritable.

Si la personne répète toujours le même mot ou des syllabes identiques (ex : « lalala ») :

  • Évitez de vous en amuser en le répétant, mais cherchez plutôt à l’arrêter.
  • Essayez de détourner son attention, de la faire passer à autre chose.
  • Encouragez-la à passer momentanément par un autre mode de communication (dessins, gestes, écrit si possible).

Document | Communiqué de presse « Aphasie et téléphone : création du premier diplôme universitaire pour accompagnants :

Document | Interview du Président de la FNAF :

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