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Contrastes

Les radiofréquences ont-elles un impact sur la biodiversité ? Ce qu’en disent les autorités sanitaires

La sauvegarde de la biodiversité, tissu vivant de notre planète, est une préoccupation nationale partagée par les opérateurs membres de la Fédération Française des Télécoms (FFTélécoms). Cependant, la perception par le public de risques associés au progrès technologique contribue à une certaine « éco-anxiété » qui crispe nos sociétés, radicalise les débats et favorise l’émergence de savoirs profanes, partout où la science est impuissante à produire des explications rationnelles.

Des « lanceurs d’alerte », s’appuyant sur des études fragiles et non répliquées affirment ainsi que les champs électromagnétiques (CEM) présenteraient un risque pour la biodiversité. Les craintes souvent exprimées pour les radiofréquences se focalisent autour de 4 types d’effets : perturbation de la magnéto-réception des animaux, contribution au syndrome d’effondrement des abeilles, troubles divers sur les animaux d’élevage et effet de résonance des ondes millimétriques sur les insectes.

Que disent les autorités sanitaires ?

En 2005, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a publié une note sur l’impact des CEM sur l’environnement et conclut que les valeurs limites recommandées par l’ICNIRP (International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection, Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants), protecteurs pour l’Homme, le sont aussi pour l’environnement s’agissant des fréquences utilisées par les radars (> 6GHz), la radiodiffusion (200MHz – 800MHz) ainsi que réservées pour les lignes à haute tension (50Hz). Les fréquences de la téléphonie mobile (700MHz-6GHz) ne sont pas prises en compte dans ce document, mais elles sont similaires à celles de la radiodiffusion qui existe depuis plus de 50 ans et pour lequel aucun effet n’a été mis en évidence.

En 2019, 14 ans plus tard, les agences nationales d’expertise reconnues, la BfS allemande (l’Office Fédéral allemand de la Radioprotection) et l’ARPANSA australienne (Australian Radiation Protection and Nuclear Safety Agency) concluent une nouvelle fois qu’il n’y a pas d’effets négatifs scientifiquement validés des CEM (incluant cette fois les fréquences de la téléphonie mobile) sur les animaux ou les plantes, au niveau individuel comme populationnel.

Les données scientifiques

Concernant les données scientifiques, la BfS conclut ainsi son colloque international de 2019 :

« Certaines espèces d’animaux et de plantes peuvent percevoir des champs électriques ou magnétiques de faibles intensités, mais ces mécanismes de perception ne sont pas encore parfaitement compris. Les sources anthropiques de CEM sont capables de modifier le comportement d’oiseaux migrateurs en laboratoire, mais la signification de ces résultats en termes écologiques n’est pas connue. Des études de terrain sont en cours. Certaines études mettent en évidence d’autres types d’effets mais leurs résultats sont incohérents entre elles et parfois contradictoires. À ce jour, il n’y a pas d’effets négatifs scientifiquement validés sur les animaux ou les plantes, au niveau individuel ou populationnel. D’importantes différences existent dans la qualité des études scientifiques. En effet, quelques résultats isolés, obtenus par des études de bonne qualité, demandent à être reproduits. »

Les animaux d’élevage

Chez l’animal d’élevage, le rôle des courants parasites dans l‘apparition de certains troubles du comportement (regroupements anormaux, refus de traite, etc.) fait consensus. Ces courants trouvent en partie leur origine dans des infrastructures d’énergie proches de l’élevage. En revanche, il n’y a aucune preuve scientifique d’un lien entre CEM et santé des animaux.

On distingue deux types d’effets potentiels des CEM : effets directs et effets indirects.

En France, à la fin de ses travaux d’audition publique[1] de février 2021, l’OPECST (l’Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Techniques) a consensuellement fait le constat suivant :

  • S’agissant des effets directs des CEM (effet thermique pour les hautes fréquences et d’induction pour les basses fréquences), aucune étude scientifique n’a pu établir un lien de causalité direct entre la proximité d’une ligne électrique ou d’une antenne-relais et la santé des animaux.
  • Pour les effets indirects (courants électriques induits, générateurs de courants parasites vagabonds circulant dans les structures métalliques), certaines études concluent à des réponses de stress d’intensité modérée à sévère, variables selon les espèces.

Concernant ces effets indirects, il existe un relatif consensus sur deux points : le rôle des courants parasites d’une part et la forte sensibilité des animaux à ces courants d’autre part. Ceux-ci ont principalement deux causes : l’une liée à l’environnement particulier des élevages (installations électriques, éléments métalliques qui peuvent être autant de conducteurs…), l’autre externe, essentiellement imputable aux lignes électriques HT ou THT implantées à proximité.

Les insectes

Concernant les insectes, l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail), laboratoire de référence sur la santé des abeilles en France et en Europe[2], n’identifie pas les radiofréquences (RF) parmi les multiples causes probables de leur déclin, tout comme le Conseil Fédéral Suisse, qui a consacré un rapport à cette question.

L’ANSES consacre ainsi plusieurs pages de son site aux causes de la mortalité des abeilles (mise à jour de mai 2021) et évoque cinq catégories de causes. Sont cités :

  • Les causes biologiques (on dénombre 29 agents pathogènes et prédateurs de l’abeille : prédateurs, parasites, champignons, bactéries et virus. Tous participent potentiellement aux affaiblissements et pertes de colonies d’abeilles).
  • L’appauvrissement des sources d’alimentation. Le manque de pollen, l’absence de réserves suffisantes, un manque de diversité ou de qualité dans ces apports, (liée notamment à la monoculture et à la perte de biodiversité) peuvent affecter la bonne santé des colonies d’abeilles.
  • Les pratiques apicoles (mauvaise tenue du rucher, etc.)
  • L’exposition aux produits chimiques employés dans l’environnement (pesticides, etc.)
  • Des causes qui restent inconnues et des effets difficiles à démontrer (effet de l’environnement nutritif, de facteurs climatiques, de certains produits phytopharmaceutiques, certaines infections virales, etc.).

Qu’en est-il de l’impact des ondes millimétriques sur les abeilles ?

Le journal « Le Monde » daté du 13 septembre 2019 décrypte ce qu’il décrit comme une « infox » largement relayée : la 5G provoquerait une hausse de la température des insectes. Elle a été propagée par le journal suisse « Le Matin » selon lequel : « Des études ont montré que les fréquences utilisées par la 5G font grimper la température corporelle des insectes » et pourraient les détruire.

Ces messages alarmistes ont pour principale origine un article intitulé « Effets biologiques des champs électromagnétiques sur les insectes » publié dans le journal de différentes associations environnementales et médicales et commandité par l’Association Allemande pour la Conservation de la Nature (NABU), en collaboration avec l’Organisation de Défense de l’Environnement et des Consommateurs allemande (Diagnose Funk) et l’Organisation Environnementale luxembourgeoise AKUT.

Pour cette revue de littérature, 190 articles ont été consultés, 83 articles ont été retenus pour une évaluation plus approfondie, dont 72 ont montré un effet des RF sur les insectes. L’auteur en conclut que « les champs électromagnétiques pourraient avoir un impact sérieux sur la vitalité des populations d’insectes ».

Or, l’autorité sanitaire allemande, la BfS, a critiqué ce travail et a estimé dans un avis que :

« Les déclarations faites par Diagnose Funk et NABU sur les effets des communications mobiles sur les insectes ne sont pas correctes. […] Dans l’ensemble, les quelques études fiables disponibles ne plaident pas en faveur d’un effet néfaste des champs haute fréquence tels que ceux trouvés à proximité des stations de base de téléphonie mobile. […] Il existe relativement peu d’études sur les effets possibles des champs à basse et haute fréquence sur le monde animal et végétal, encore moins de haute qualité. »

Les plantes

Sur les plantes, les résultats d’études sur des plants de tomates ne permettent pas non plus de déductions en termes écologiques.

Pour aller plus loin

Présentation de la BfS (PDF, 2,3 MO)

Position de l’autorité sanitaire australienne (ARPANSA) sur l’environnement, les animaux et les plantes

Article de l’ANSES sur la santé des abeilles (10 mai 2021)

Réponse du conseil fédéral Suisse sur les abeilles (18 décembre 2019)

Compte rendu de l’audition publique de l’OPECST sur l’impact des champs électromagnétiques sur la santé des animaux d’élevage, 18 février 2021

 


[1] Office Parlementaire d’Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST). L’impact des champs électromagnétiques sur la santé des animaux d’élevage. Audition publique du 18 février 2021. Programme (PDF, 1,2 MO) | Compte rendu | Vidéo.

[2] Au titre de son mandat européen de référence, le laboratoire ANSES de Sophia Antipolis a piloté EPILOBEE, un vaste programme de surveillance épidémiologique en Europe visant à mieux caractériser le phénomène de surmortalité des abeilles.

Voir aussi